Opérations escargots, blocages des gares et aéroports, voitures de concurrents prises pour cible: près de 3.000 taxis en colère ont dénoncé jeudi la "concurrence sauvage" de l'application mobile UberPOP lors d'une mobilisation émaillée de violences, promettant de "poursuivre le mouvement".
Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a dû écourter son déplacement à Marseille pour rentrer à Paris "poursuivre le dialogue" avec les taxis.
Il recevait depuis 19H00 une délégation de l'intersyndicale, qui venait d'affirmer sa volonté de "poursuivre le mouvement", en dépit des accrochages survenus jeudi et au risque d'entamer le capital de sympathie des taxis.
Le ras-le-bol est tel qu'"on est obligé de passer par cette étape de la radicalité", plaide Abdel Ghalfi (CFDT).
Porte Maillot à Paris, des taxis ont pris d'assaut et incendié deux voitures de transport avec chauffeur (VTC) --pourtant autorisées et n'ayant rien à avoir avec UberPOP--, provoquant l'intervention des forces de l'ordre, dans une odeur âcre de fumée.
Dans la capitale et aux abords de ses aéroports, au moins huit chauffeurs de taxis, VTC ou UberPOP ont été placés en garde à vue jeudi, pour violences ou "exercice illégal de la profession de taxi". Neuf personnes ont été interpellées à Lyon, dont trois chauffeurs de taxi qui pourraient correspondre aux auteurs présumés d'une violente agression d'un client UberPOP ce weekend, mais toutes sont reparties libres.
Condamnant des violences "inadmissibles", le Premier ministre Manuel Valls, en marge d'un voyage en Colombie, a promis que leurs auteurs, "qui se trouvent dans les deux camps", seraient "poursuivis".
Face aux tensions, le gouvernement a multiplié jeudi les gestes de fermeté, avec un signalement à la justice et un arrêté d'interdiction de l'activité d'UberPOP à Paris comme il y en a déjà eu dans d'autres départements.
"C'est un arrêté préfectoral, on va le contester et on verra ce que donne le recours, pour l'instant ça ne change rien, UberPOP peut continuer", a balayé le directeur général d'Uber France, Thibaud Simphal, sur BFM Business.
- 'guet-apens' -
Le groupe américain de VTC Uber conteste la constitutionnalité de la loi sur les transports routiers et a fait appel de sa condamnation à 100.000 euros d'amende pour avoir abusivement présenté UberPOP comme un service de covoiturage. Cet appel, qui sera examiné en octobre, étant suspensif, Uber a maintenu son service à prix cassés, qui met en relation des passagers et des particuliers au volant de leur véhicule personnel.
"Au lieu de canaliser la violence, comme c'est sa mission fondamentale, la parole de l'Etat la libère", ont dénoncé dans un communiqué des avocats de chauffeurs UberPOP, accusant des taxis de s'organiser "en milices privées" et de monter "des guet-apens".
Dans la capitale, la circulation a été perturbée dans la matinée. Les accès à la gare du Nord comme à la gare de Lyon ont été bloqués par des dizaines de voitures, dont celle d'Olivier Noblot, taxi depuis 22 ans, "prêt à revenir tous les jours s'il le faut et à bloquer Paris".
Ambiance tendue aussi à l'aéroport d'Orly où des grévistes ont fait la chasse aux chauffeurs clandestins. A Roissy, le blocage des accès à plusieurs terminaux a été levé dans l'après-midi. Dans les deux aéroports, des VTC ont renversé des personnes, les blessant légèrement.
Tensions et perturbations également à Lyon, Toulouse, Bordeaux, Nice ou Marseille. Pour Gilles Alonso, du syndicat Alliance Taxi 13, "quand on ne s'acquitte d'aucune charge sociale, c'est facile de faire des courses à 3 ou 4 euros".
Au total, 2.800 taxis ont été mobilisés en France avec une "trentaine de points de blocage" dont certains persistaient jeudi soir, selon une source policière.
Certaines situations on fait le buzz, comme les tweets de la chanteuse américaine Courtney Love, veuve du leader de Nirvana Kurt Cobain: "Ils frappent notre voiture avec des barres de fer. C'est la France? Je suis plus en sécurité à Bagdad. François Hollande, où est la putain de police?".
UberPOP revendique 400.000 utilisateurs en France. Mais ses chauffeurs ne payent ni cotisations ni impôts, n'ont pas suivi les 250 heures de formation nécessaires et ne sont pas assurés professionnellement.
Les conducteurs non enregistrés encourent jusqu'à un an de prison, 15.000 euros d'amende, la suspension du permis et la confiscation du véhicule.
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