Des centaines de taxis en colère ont convergé jeudi en tout début de matinée autour des aéroports parisiens et dans la capitale, pour dénoncer la "concurrence sauvage" de l'application mobile UberPOP, créant d'importantes perturbations de circulation.
"Le but c'est d'occuper l'espace, parce qu'il y a un vrai ras-le-bol", a expliqué Karim Asnoun, de la CGT, annonçant des sit-in dans de nombreuses villes de France pour cette journée de colère.
Les autorités ont appelé jeudi Parisiens et banlieusards à emprunter les transports en commun en raison des fortes perturbations de la circulation automobile provoquées par des manifestations de taxis en colère.
Les accès à trois terminaux de Roissy (2E, 2F et 2D) étaient bloqués et la circulation perturbée aux abords de l'aéroport comme dans plusieurs quartiers de Paris jeudi matin, notamment vers la Porte Maillot à l'ouest de la capitale, où des CRS sont intervenus peu après 7 heures pour dégager le périphérique bloqué, dans une odeur âcre de fumée, le claquement de pétards et le fracas de poubelles renversées sur la chaussée.
L'accès extérieur à la Gare du Nord était entravé par des dizaines de taxis, a constaté l'AFP. Et l'ambiance était tendue à Orly où de nombreux taxis faisaient la chasse aux chauffeurs clandestins. Les forces de l'ordre, présentes en nombre, ont verbalisé l'un de ces chauffeurs, selon un journaliste de l'AFP sur place.
"La base attend de nous des messages forts, on est obligé de passer par cette étape de la radicalité", a expliqué Abdel Ghalfi (CFDT).
Les taxis, qui dénoncent "la précarisation des chauffeurs" et répondent à l'appel de l'ensemble des syndicats, exigent l'arrêt du service UberPOP et l'application des lois réprimant les taxis clandestins.
Depuis plusieurs mois, le groupe américain des voitures de transport avec chauffeur (VTC) Uber s'est engagé dans un bras de fer avec l'Etat, autour de son application mobile UberPOP, un service à prix cassés qui met en relation des passagers et des conducteurs non professionnels assurant le transport avec leurs véhicules personnels.
- Appels au calme -
Uber revendique 400.000 utilisateurs d'UberPOP en France, où le nombre des taxis est faible. Mais les chauffeurs sont des particuliers qui ne paient ni cotisations sociales ni impôts, n'ont pas suivi les 250 heures de formation nécessaires pour obtenir un agrément et ne sont pas assurés professionnellement.
Les syndicats de taxis ont appelé au "calme" et à "ne pas répondre aux provocations", alors que le climat s'est tendu avec plusieurs agressions récentes de clients ou de chauffeurs UberPOP.
A Strasbourg la semaine dernière, à deux reprises, un chauffeur de taxi s'est fait passer pour un client d'UberPOP pour amener le conducteur dans un endroit isolé, où il a été pris à partie par des chauffeurs de taxi qui ont endommagé son véhicule.
Craignant que ses chauffeurs professionnels soient assimilés à des conducteurs UberPOP, la société de VTC Allocab a même demandé à ses employés de ne pas mettre de costume jeudi et de demander à leurs clients de s'asseoir à l'avant.
Le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, a lancé mardi "un appel au calme", tout en soulignant qu'UberPOP était en "situation d'illégalité absolue".
Le procureur de Paris, François Molins, a également promis de "rehausser le niveau de la réponse pénale, notamment à l'égard des réitérants et des récidivistes, en passant à des réponses plus dures", évoquant "des saisies de véhicules".
Le groupe Uber est visé depuis fin 2014 par une enquête préliminaire à Paris, notamment pour organisation illégale d'un "système de mise en relation de clients avec des personnes qui se livrent au transport routier" de passagers "à titre onéreux".
La loi Thévenoud, votée en octobre 2014, interdit de proposer une prestation de transport routier "à titre onéreux" si l'on n'est pas enregistré comme chauffeur de taxi ou VTC. Les conducteurs encourent jusqu'à un an de prison, 15.000 euros d'amende, la suspension du permis et la confiscation du véhicule.
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