Larmes, chants et dénonciation du "diable": l'église de Charleston, en Caroline du Sud, a accueilli dimanche ses paroissiens pour un premier service religieux depuis le massacre mercredi dans cette ville des Etats-Unis de neuf Noirs abattus par un jeune suprématiste blanc.
Cette tuerie raciste, l'une des pires de l'histoire récente des Etats-Unis, a choqué une partie de l'Amérique et relancé les controverses tant sur les tensions raciales que sur la législation des armes à feu ou encore sur la place du drapeau confédéré du Sud historique.
Plusieurs centaines de personnes, blanches et noires, occupaient dès 09H30 (13H30 GMT) les bancs de l'Emanuel African Methodist Episcopal Church, la plus vieille église de la communauté noire de Charleston, lieu emblématique de la lutte pour les droits civiques et théâtre du bain de sang mercredi soir provoqué par le jeune Dylann Roof.
Des centaines d'autres fidèles et badauds, principalement blancs, étaient aussi massés, faute de place, à l'extérieur de l'église, d'où ils pouvaient entendre, grâce à des hauts-parleurs, le long discours du pasteur Norvel Goff et les chants religieux.
Une chorale de gospel a chanté plusieurs minutes face à une foule calme, parfois émue aux larmes.
La cérémonie, très forte en émotions, a été retransmise pendant près de deux heures par les télévisions américaines.
Le révérend Goff a maintes fois fait référence, sans le nommer, à Dylann Roof, le tueur présumé de neufs paroissiens noirs, et qui a été inculpé et maintenu en détention.
Mercredi, Dylann Roof, 21 ans, s'était introduit dans une soirée de lecture biblique de l'église. Après avoir sagement assisté à une heure d'étude, le jeune homme s'était levé et a ouvert le feu, touchant à plusieurs reprises ses victimes.
Les paroissiens "étaient dans la maison du seigneur, étudiant ses paroles, priant les uns avec les autres", a clamé le dignitaire religieux. "Mais le diable est aussi rentré. Et il a sans aucun doute essayé de prendre le contrôle. Mais grâce à Dieu, alléluia () il ne pouvait pas contrôler vos fidèles. Et il ne pouvait pas s'emparer de votre église", s'est exclamé M. Goff.
Le pasteur de la paroisse, Clementa Pinckney, élu démocrate du Sénat de Caroline du Sud, a été tué mercredi soir, ainsi que deux hommes et six femmes, âgés de 26 à 87 ans.
En mémoire aux victimes, les cloches d'une vingtaine d'églises à et autour de Charleston ont sonné, tout comme des dizaines d'autres aux Etats-Unis.
- diatribes racistes -
Samedi déjà, plusieurs manifestations avaient secoué la Caroline du Sud.
Des milliers de personnes s'étaient rassemblées à Columbia, capitale de l'Etat et siège du parlement local, devant lequel flotte toujours le drapeau confédéré, symbole controversé du sud esclavagiste des Etats-Unis, défait lors de la Guerre de sécession (1861-1865).
Les manifestants étaient venus exiger le retrait de ce drapeau, qui n'avait pas été mis en berne en hommage aux victimes après la tuerie, contrairement au drapeau fédéral, la bannière étoilée, ou au drapeau de la Caroline du Sud.
Symbole durable de la fierté et de l'héritage du Sud pour ses partisans, le drapeau confédéré représente le racisme et la théorie de la suprématie blanche pour ses détracteurs.
Une autre manifestation s'est tenue samedi soir, à Charleston, à l'appel du mouvement "Black Lives Matter" ("La vie des Noirs compte").
La découverte samedi d'un site internet attribué à M. Roof a également fourni un éclairage sur le massacre.
On y voit le jeune Blanc brûler la bannière étoilée et brandir le drapeau confédéré, mais surtout, dans un manifeste bourré de fautes d'orthographe, justifier a priori son crime par sa haine des Noirs.
Le FBI a assuré qu'il travaillait à l'authentification du site, qui, selon des médias américains, aurait été ouvert en févier au nom de Dylann Roof.
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