Crime de haine raciste? Nouvelle conséquence de la législation américaine sur les armes à feu? Le massacre de neuf personnes dans une église noire à Charleston provoquait stupeur et indignation dans cette ville touristique au charme discret du sud des Etats-Unis.
Cette paisible cité de 128.000 âmes, qui fut un temps la capitale des Etats-Unis pour le commerce transatlantique des esclaves, se trouvait en état de choc jeudi au moment où l'auteur présumé de la fusillade, un jeune blanc de 21 ans, était de retour après son arrestation dans un Etat voisin.
Lorsque la police a rouvert les rues adjacentes à l'Emanuel African Methodist Episcopal Church où s'est déroulé le drame mercredi, Joyce Gilliard s'est précipitée dans le bâtiment blanc du XIX siècle de style gothique pour présenter ses hommages.
"Une amie de la famille a dit que trois membres de sa famille ont été tués", a indiqué la coiffeuse de 22 ans, qui travaille dans l'industrie du cinéma et dont la grand-mère habite à proximité.
"Tout le monde est hagard, tout le monde est encore en état de choc", a-t-elle confié à l'AFP, se protégeant du chaud soleil sous un chapeau à large bord, au sujet de l'atmosphère régnant dans sa ville.
- Fleurs et prières -
Arrivée à l'église, elle s'est retrouvée face à un amoncellement toujours grandissant de fleurs et de ballons à l'hélium déposés par des anonymes en deuil. Et à la famille Johnson venue du Delaware (est), des Blancs en villégiature, se recueillant.
La jeune coiffeuse, noire, s'est jointe à Rhonda, 50 ans, et à ses filles Madison, 16 ans, et Lauren, 21 ans, avant de les enlacer chacune leur tour. Sous les objectifs de photographes désireux de saisir cet instant de communion inter-communautaire.
"Je pense que c'est le diable" qui a commis ce massacre, a pesté la mère de famille, décrivant les siens comme de fervents chrétiens, tout en essayant de retenir ses larmes.
Sur le trottoir, de l'autre côté de la rue, Daron-Lee Calhoun II, un Noir de 27 ans, voit dans ce massacre la preuve de "la purulence de la doctrine de la suprématie blanche et du racisme", en particulier dans les Etats du sud des Etats-Unis.
- Pas une surprise -
"Est-ce que je suis choqué par ce qu'il s'est passé? Oui. Est-ce que je suis meurtri par ce qu'il s'est passé? Oui. Mais surpris? C'est difficile de dire que je suis surpris", a-t-il reconnu.
"C'est du terrorisme domestique. C'est un homme qui a mené à bien un complot terroriste sur le sol américain", a poursuivi ce chercheur dans un centre d'études afro-américaines.
Non loin, en short et en sandales pour affronter un après-midi chaud et humide, Valentino Fazi pleure l'une des victimes. Sharonda Singleton, 45 ans, était pasteur à l'église et professeur à son école.
"C'était une femme très pacifique. Je n'arrive pas à croire ce qu'il lui est arrivé", a confié le mécanicien automobile de 19 ans, blanc et natif de Charleston. Pour lui, "le racisme n'était plus un problème à Charleston".
Plus à l'écart de l'église, dans un parc ombragé quelques pâtés de maison plus loin, le militant local anti-armes à feu Jack Logan affirme que cette fusillade ne fait que renforcer sa conviction.
Pendant les quelques heures de conduite nocturnes à travers son Etat pour venir à Charleston, il dit même avoir perdu foi en le Second amendement qui octroie le droit constitutionnel aux Américains de "posséder et de porter des armes".
Il a fondé l'association "Put Down The Guns Now Young People" ("déposez les armes maintenant les jeunes").
Ce n'est pas une coïncidence, selon lui, si le pasteur de l'église et sénateur local de l'Etat Clementa Pinckney, 41 ans, qui a succombé dans l'attaque, plaidait pour une vérification approfondie des antécédents pour les acheteurs d'armes à feu.
"Nous nous inquiétons au sujet de l'Irak, de l'Afghanistan et de ce genre d'endroits, mais nous avons tout ça juste ici en Amérique", a relevé cet homme noir. "Nous l'avons ici, dans notre jardin, le terrorisme car c'est exactement ce dont il s'agit".
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.