Les avocats de 16 prévenus, dont la star du handball Nikola Karabatic, jugés pour leur implication dans une affaire de paris liés à un match présumé truqué, ont vivement contesté lundi toute l'information judiciaire au premier jour du procès.
Au tribunal de Montpellier où s'est ouvert le procès prévu pour durer deux semaines, les défenseurs ont demandé l'annulation de toute l'information judiciaire et le renvoi du procès à l'instruction en raison d'une procédure entachée selon eux de nombreuses nullités.
"Je ne sais pas si le match était truqué mais l'information judiciaire, elle, est truquée", a lancé à la barre Jean-Robert N'Guyen Phung, l'un des avocats des frères Karabatic, demandant l'audition du magistrat instructeur, Thomas Mendl, actuellement en poste en Corse, et des policiers ayant travaillé avec lui.
Parmi les griefs reprochés au juge d'instruction figurent notamment des "réunions hors procédure" ou encore les "tentatives de déstabilisation" du ministère public notamment lors d'une conférence de presse du procureur de la République de Montpellier après les gardes à vue des joueurs.
Lors de cette conférence, le procureur à l'époque, Brice Robin, s'était interrogé sur le "droit au silence" exercé par les joueurs devant les enquêteurs.
"Cela s'appelle une tentative de déstabilisation" et "se traduit par une atteinte irrémédiable aux droits de la défense", a affirmé l'avocat de Primoz Prost, Me Loïc Guérin.
Le procureur Patrick Desjardins a rejeté en bloc ces arguments, demandant de les renvoyer "au fond" afin que le procès se tienne. "Tout ça est un faux débat, qui consiste à dire que ce procès ne doit pas avoir lieu. Si, ce procès doit avoir lieu !", a-t-il lancé.
Les 16 prévenus présents sont poursuivis pour "escroquerie" ou "complicité d'escroquerie" et encourent cinq ans de prison et 375.000 euros d'amende.
A son arrivée au tribunal, vêtu d'un tee-shirt bleu et d'un pantalon beige, Nikola Karabatic a indiqué qu'il parlerait "après le procès", répondant un simple "oui" à un journaliste qui lui demandait s'il maintenait sa version des faits: il nie toute implication dans les paris en question.
Dans la salle d'audience, les prévenus, assis sur deux rangs, ont sagement écouté les débats très juridiques et profité des interruptions pour se retrouver, alors qu'ils ne jouent, pour beaucoup, plus dans les mêmes clubs.
Au total, huit joueurs qui jouaient à l'époque des faits à Montpellier, comparaissent: outre Nikola et Luka Karabatic, les Slovènes Primoz Prost (Gottingen/GER) et Dragan Gajic (Montpellier), Samuel Honrubia (PSG), Mladen Bojinovic (PSG), Mickaël Robin (Cesson-Rennes) et Issam Tej (Montpellier).
L'affaire avait éclaté le 16 mai 2012 avec une plainte de la Française des jeux. Selon cette plainte, le 12 mai à 12H00, 102.300 euros ont été misés sur le fait que Cesson mènerait à la pause. Un montant exorbitant par rapport aux 3.000 euros de moyenne pour une rencontre de handball.
- Tricherie 'en équipe' -
L'enquête a permis d'établir que ces paris avaient été placés dans plusieurs villes après un top-départ peu avant 10h00, à la cote de 2,9 contre 1, avec des tickets de 100 euros garantissant l'anonymat des gagnants. Lors du match, Cesson menait effectivement à la pause (15-12).
Aux yeux des experts, il y avait certes des "ingrédients" expliquant "un match raté" des Montpelliérains, qui avaient finalement perdu (31-28). Mais il y avait aussi une "convergence d'indicateurs anormaux, trop curieuse pour être innocente et conjoncturelle".
Dans son réquisitoire définitif, M. Desjardins, a évoqué une tricherie "en équipe" avec peut-être pour but premier d'augmenter la cagnotte des joueurs de Montpellier, qui devait être utilisée pour un séjour à Ibiza. Mais ensuite, le groupe a cédé à la tentation.
Pour l'accusation, l'opération a débuté la veille du match avec le téléchargement de l'application "Parions sport" sur le téléphone de Nikola Karabatic. Il s'agissait de suivre l'évolution de la cote et de parier au moment où celle-ci ne serait pas trop élevée afin de garder l'anonymat des gagnants.
C'est le lendemain, peu avant 10h00, qu'est intervenu le top-départ des paris. De nombreux appels ont été repérés, par exemple sur le téléphone de Géraldine Pillet, la compagne de Nikola Karabatic, la veille comme le jour du pari, a constaté l'enquête.
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