Feux d'artifice, concert de klaxons, les Kurdes de Turquie ont célébré dimanche en fanfare dans leur fief de Diyarbakir (sud-est) l'entrée en force de 80 députés de "leur" Parti démocratique du peuple (HDP) lors des élections législatives.
Dans les rues de la "capitale" kurde du pays, les voitures ont paradé bruyamment, leurs passagers hissés aux travers des fenêtres, les doigts fièrement écartés en "V" en signe de victoire. Quelques coups de feu ont même été tirés en l'air.
Ces scènes de liesse ont eu lieu deux jours seulement après un attentat à la bombe qui a fait deux morts et plus d'une centaine de blessés parmi les partisans du HDP venus assister à un meeting de leur chef de file, Selahattin Demirtas.
A la fermeture des bureaux de vote, l'ambiance était encore tendue, notamment par crainte de fraudes lors du dépouillement.
Mais dès l'annonce des premiers résultats provisoires qui confirmaient que le HDP avait passé le seuil des 10% de voix, nécessaires pour qu'un parti soit représenté au Parlement, une explosion de joie a eu lieu à Diyarbakir. Le parti a finalement obtenu 13% des suffrages.
Ses supporters ont dansé sous les youyous triomphants, scandant le slogan de campagne du parti: "nous sommes le HDP, nous sommes le Parlement."
"C'est une nuit de carnaval", s'est enthousiasmé Huseyin Durmaz, un Kurde de 47 ans. "Les Kurdes ont explosé les urnes. Nous ne croyons plus à l'AKP", a-t-il ajouté en référence au Parti de la justice et du développement (AKP, islamo-conservateur) qui a perdu dimanche la majorité absolue qu'il détenait depuis treize ans.
- 'Avertissement à l'AKP' -
"C'est une nuit semblable à celle où Diyarbakir célébrait la libération de Kobané", a comparé Aytbac Bayram, 34 ans.
En janvier dernier, la reprise par des combattants kurdes de la ville syrienne assiégée par les jihadistes du groupe État islamique (EI) avait été acclamée en Turquie.
"La montée du HDP symbolise l'unité des Kurdes et c'est une étape de plus vers la démocratie", a estimé Yalman, un autre partisan du parti kurde, "c'est un avertissement adressé à l'AKP et ses tendances dictatoriales".
Violant son devoir de neutralité, le président Recep Tayyip Erdogan, qui domine la politique turque depuis plus de dix ans, a fait campagne pour que son parti obtienne au moins 330 des 550 sièges du Parlement, afin de réformer la Constitution et de renforcer ses pouvoirs.
"L'AKP s'est tiré une balle dans le pied, il a perdu la confiance du peuple", a estimé Orhan Akgun, un Kurde de Diyarbakir qui dit avoir voté AKP par le passé.
Sous l'impulsion de M. Erdogan, le gouvernement a accordé ces dernières années de nouveaux droits aux Kurdes, notamment pour l'utilisation de leur langue. Mais le chef de l'Etat a récemment changé de rhétorique et mis entre parenthèses le processus de paix engagé avec les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).
"Nos représentants vont être au Parlement. Ils vont défendre les droits des Kurdes", s'est réjoui Selcuk Atasever, responsable d'un bureau de vote de Diyarbakir. "A partir de maintenant, nous aurons plus de poids dans le processus de paix".
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