L'Etat a finalement tranché mercredi en faveur d'une reprise par EDF de la majorité de l'activité réacteurs d'Areva tout en s'engageant à renflouer le groupe, signant la fin du modèle intégré prôné depuis la création du spécialiste du nucléaire en 2001.
"EDF a vocation à devenir actionnaire majoritaire" d'Areva NP (ex-Framatome), la filiale réacteurs du groupe nucléaire, tandis que ce dernier "conservera une participation stratégique" dans cette filiale, a indiqué l'Elysée dans un communiqué diffusé en fin de journée.
La décision a été officialisée après une réunion au sommet un peu plus tôt à l'Elysée, entre le président de la République François Hollande, le premier ministre Manuel Valls et les quatre ministres concernés par le dossier.
"Dès à présent, les activités de conception, gestion de projets et commercialisation des réacteurs neufs d'EDF et d'Areva seront rapprochées dans une société dédiée", explique l'Elysée.
La taille de la participation minoritaire qu'Areva détiendra dans cette nouvelle société n'a pas été précisée, ce qui n'exclut donc pas que le capital de la filiale puisse être aussi ouvert à d'autres partenaires, des informations de presse évoquant notamment la piste d'investisseurs chinois.
L'Etat s'est donc rangé du côté de la proposition faite il y a dix jours par le PDG d'EDF Jean-Bernard Lévy, plutôt que derrière l'option moins radicale d'un rapprochement limité à la mise en commun des équipes d'ingénieurs d'Areva et EDF travaillant sur la conception de réacteurs.
L'électricien avait proposé un peu plus de deux milliards d'euros pour la reprise d'Areva NP, selon le quotidien Les Echos, un montant ni démenti ni confirmé par les deux groupes.
Areva NP emploie environ 15.000 salariés sur les quelque 44.000 que compte Areva. Les syndicats du groupe, qui se sont toujours opposés à sa cession, ont vivement réagi, après avoir été reçus par la direction mercredi.
C'est un "pillage de tombe" organisé au profit d'EDF, a dénoncé Jean-Pierre Bachmann, coordinateur CFDT, qui s'inquiète en outre du partenaire qui pourrait accompagner EDF. "Si c'est la Chine, ça risque d'être un pillage de compétences", a-t-il dit.
"L'avenir nous dira si c'est une bonne solution", a déclaré le coordinateur FO José Montès, pour qui il faut en tous cas "réorienter le rouleau compresseur social" des 3.000 à 4.000 suppressions d'emplois prévues par Areva dans l'Hexagone.
"C'est la fin d'une période d'incertitude insupportable pour les salariés", a affirmé Christophe Laisné (Unsa Spaen). Il a précisé à l'AFP que les syndicats seraient reçus "sous un mois" par le ministre de l'Economie Emmanuel Macron pour connaître "la fin des négociations".
Areva et EDF, détenus respectivement à 87% et 84,5% par des capitaux publics, "finaliseront les principes de ce projet dans un délai d'un mois", selon l'Elysée.
Areva a assuré dans un communiqué qu'il travaillerait "dans un esprit de complète coopération" avec EDF pour mettre en oeuvre la décision de l'Etat.
Et le groupe "va étudier les impacts" de cette décision "sur les procédures d'information-consultation (des salariés, ndlr) qui étaient prévues courant juin".
- Retour à l'ex-Cogema -
En parallèle, l'Etat s'est engagé à à renflouer Areva, qui a essuyé l'an dernier près de 5 milliards d'euros de pertes et a grand besoin d'argent frais pour financer ses activités. Cette recapitalisation se fera "à la hauteur nécessaire", a simplement annoncé l'Elysée, sans plus de précisions.
Si selon l'Elysée, cet arbitrage "préserve l'intégrité d'Areva NP", il n'en signe pas moins la fin du fleuron français du nucléaire sous sa forme actuelle, et de son modèle intégré sur toute la chaîne de valeur de l'atome.
Hormis la participation qu'il conservera dans l'activité réacteur, le futur Areva sera ramené au périmètre de l'ex-Cogema, à savoir la seule gestion du cycle du combustible, de l'extraction de l'uranium au retraitement des déchets.
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