Six anciens collaborateurs de Nicolas Sarkozy, dont Claude Guéant, Xavier Musca et Emmanuelle Mignon, ont été interrogés toute la journée en garde à vue mercredi dans l'enquête sur les sondages de l'Elysée, qui avaient été éplinglés par la Cour des comptes lors du dernier quinquennat.
Tous ont été relâchés dans la soirée, selon deux sources proches de l'enquête. "Il n'y a pas de mise en examen" à ce stade des investigations, a indiqué à l'AFP l'avocat de Claude Guéant, Me Philippe Bouchez el-Ghozi, qui s'exprimait pour son client.
Outre Claude Guéant et Xavier Musca, qui s'étaient succédé au poste de secrétaire général de la présidence de la République, et Emmanuelle Mignon, l'ancienne directrice de cabinet de Nicolas Sarkozy, trois anciens conseillers élyséens ont été interrogés par la Brigade de répression de la délinquance économique (BRDE). Il s'agit de Jean-Baptiste de Froment, Julien Vaulpré et Jean-Michel Goudard.
L'enquête, menée par le juge d'instruction Serge Tournaire, porte sur d'éventuelles irrégularités dans les contrats conclus par l'Elysée avec neuf instituts de sondage ou sociétés de conseil durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy. Parmi elles, les sociétés de Patrick Buisson (Publifact) ou de Pierre Giacometti (Giacometti-Peron), deux proches conseillers de l'ancien président.
La polémique sur ces sondages avait commencé en 2009, après la publication d'un rapport de la Cour des comptes qui épinglait sévèrement une convention signée le 1er juin 2007 entre l'Elysée et le cabinet de Patrick Buisson "pour un coût avoisinant 1,5 million d'euros".
"Aucune des possibilités offertes par le code des marchés publics" n'a été appliquée, jugeait la Cour des comptes, en déplorant "le caractère non seulement très succinct de la convention (une seule page) mais également exorbitant au regard des règles de l'exécution de la dépense publique". Signée par Emmanuelle Mignon, cette convention donnait à la société Publifact "une totale liberté d'appréciation" sur les dépenses à engager, s'inquiétait la Cour.
- Longue bataille procédurale -
"Carte blanche et chéquier disponible", avait fustigé l'association de lutte contre la corruption Anticor, qui avait porté plainte en février 2010. L'association n'avait obtenu que fin 2012, au prix d'une longue bataille procédurale, que le juge Serge Tournaire puisse enquêter sur des faits présumés de favoritisme et détournement de fonds publics.
Par la suite, les investigations ont été étendues à l'ensemble des contrats de conseil ou de sondages commandés durant le quinquennat Sarkozy, chiffrés à plus de 9 millions d'euros dans une plainte ultérieure d'Anticor.
Dans un rapport de contrôle en 2010, la Cour des comptes avait noté pour sa part "un sérieux effort de rationalisation et d'économies" du côté de l'Elysée, en relevant que la convention avec Publifact n'avait "plus donné lieu à commandes de nouvelles études" après septembre 2009.
La plainte d'Anticor dénonçait des faits de favoritisme dans l'attribution des contrats, mais aussi des détournements de fonds publics, certains sondages étant "étrangers" à ses yeux à la fonction de président de la République. L'association pointait du doigt une étude sur la liaison entre Nicolas Sarkozy et son épouse Carla Bruni ou encore sur des adversaires potentiels du président, comme Marine Le Pen, et, du moins à l'époque, Dominique Strauss-Kahn.
Des perquisitions avaient été menées en avril 2013 chez Patrick Buisson.
Ce dernier, venu de l'extrême droite -- il avait dirigé le journal Minute -- et réputé très influent auprès de Nicolas Sarkozy durant son quinquennat et la présidentielle perdue de 2012, a refait parler de lui avec les fameux enregistrements clandestins qu'il réalisait à l'Elysée.
En juillet 2014, la cour d'appel de Paris a confirmé sa condamnation à verser des dommages et intérêts à l'ancien président, qui a coupé les ponts avec son ancien conseiller.
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