L'arrestation de cinq personnes, quatre jeunes hommes dont deux convertis et la mère d'un jihadiste, à Saint-Denis de la Réunion mardi matin constitue le premier coup porté à une filière présumée dans un département d'outre-mer.
Si des ressortissants des DOM ont déjà été répertoriés dans des filières, dont certains sont morts en Syrie et en Irak, c'est la première filière identifiée sur le territoire d'un DOM, selon des sources proche de l'enquête et policière.
Pour ce coup de filet, 24 policiers étaient arrivés sur l'île en provenance de l'Hexagone dès dimanche. Et c'est mardi à l'aube que cinq habitants de Saint-Denis ont été interpellés dans un quartier du centre-ville par les policiers de la direction départementale de la sécurité intérieure (DDSI) et du groupement d'intervention de la police nationale (GIPN).
Les personnes mises en cause ont été conduites au commissariat et placées en garde à vue, qui peut durer 96 heures dans le cadre de l'information judiciaire en cours pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste".
Cette procédure avait été lancée en avril, dans la suite d'une enquête préliminaire ouverte en novembre 2014 par le parquet antiterroriste. A l'origine de l'enquête, il y avait eu le signalement de parents après la disparition de leur fils à Poitiers, où il s'était installé depuis environ un mois, en provenance de la Réunion.
Selon plusieurs sources, les cinq personnes interpellées sont quatre hommes âgés de 24 ans, 21 ans et 18 ans pour deux d'entre eux qui sont jumeaux, et d'une femme de 62 ans.
L'homme de 21 ans est le "personnage central, connu comme un prédicateur salafiste et il est soupçonné d'avoir exercé son influence sur six personnes qui sont déjà parties en Irak ou en Syrie", a expliqué à l'AFP une source proche du dossier.
La femme de 62 ans est la mère de l'une des six personnes parties faire le jihad. Issu d'une famille catholique, il s'était converti.
Les jumeaux de 18 ans étaient soupçonnés d'être sur le point de partir, selon la même source. Ce qu'a confirmé l'avocat d'un des deux frères, aux médias locaux à Saint-Denis. "Il me l'a confirmé mais il fait partie d'un groupe. Il a été influencé, il s'est converti et m'a dit qu'il envisageait de partir faire le jihad mais plus par rapport à ses amis () que par conviction forte", a déclaré Me Christophe Molière à Antenne Réunion.
Selon l'avocat, le jeune homme était "déscolarisé depuis un certain temps", s'était "converti récemment" et "comptait travailler" pour pouvoir partir "quand il aurait de l'argent".
- Inquiétude nouvelle-
Les six départs évoqués par des sources depuis Paris permettent d'éclairer d'un jour nouveau des informations connues sur l'île depuis le début de l'année.
Dans ses v?ux à la presse en janvier, le préfet Dominique Sorain avait révélé le départ de plusieurs personnes pour aller faire le jihad au Moyen-Orient. Des sources locales avaient précisé que cela concernait une demi-douzaine de volontaires partis en Syrie ou en Irak.
Parmi eux se trouvait notamment un jeune homme de 23 ans résidant à Saint-André (est de La Réunion) qui aurait été tué au nord de Tikrit en Irak le 7 avril dernier lors d?une opération de l'armée irakienne contre les forces du groupe État islamique.
Alors que la Réunion est souvent érigée en exemple du "vivre ensemble" où les religions (catholicisme, islam, hindouisme, bouddhisme) cohabitent en bonne intelligence, des voix s'étaient élevées ces derniers mois pour mettre en garde contre le risque de radicalisation.
L'île "n'est pas à l'extérieur du monde", avait souligné en janvier la ministre des Outre-mer George Pau-Langevin appelant à être "attentif à ce qui se passe sur les réseaux sociaux" et à "repérer les quelques personnes radicalisées qui peuvent se mettre un jour ou l'autre à dériver".
Les autorités religieuses locales, peu enclines à aborder le sujet, reconnaissaient après les attentats de Charlie Hebdo une inquiétude nouvelle devant l'impact d'internet, l'impossibilité de contrôler les lieux de culte informels et une pratique plus rigoriste importé par des Français de l'Hexagone.
Selon des chiffres du ministère de l'Intérieur publiés en mars, 48 cas de radicalisation ont été signalés aux autorités à La Réunion depuis avril 2014.
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