L'ex-confident de Liliane Bettencourt, François-Marie Banier, et le gestionnaire de fortune de l'héritière de L'Oréal, Patrice de Maistre, ont tous deux été condamnés jeudi à Bordeaux à des peines de prison ferme pour "abus de faiblesse" au détriment de la milliardaire et "blanchiment".
Le tribunal correctionnel de Bordeaux a en revanche relaxé l'ex-ministre UMP Eric Woerth de toute responsabilité dans les deux volets de l'affaire pour lesquels il était poursuivi.
François-Marie Banier, 67 ans, est condamné à trois ans de prison, dont six mois avec sursis, 350.000 euros d'amende et 158 millions d'euros de dommages et intérêts à Liliane Bettencourt. Patrice de Maistre, 66 ans, écope quant à lui de trente mois de prison, dont douze avec sursis, et 250.000 euros d'amende.
Présents à Bordeaux pour l'énoncé du jugement, les deux hommes ont annoncé leur intention de faire appel de ces condamnations, à peine inférieures aux réquisitions prononcées en début d'année.
Le président du tribunal, Denis Roucou, a insisté sur la "particulière vulnérabilité" de Liliane Bettencourt, 92 ans aujourd'hui, "traumatisée et profondément troublée" après le décès de son mari en novembre 2007.
"Elle s'est retrouvée à la merci d'hommes en qui elle plaçait sa confiance" et "ceux des prévenus qui la fréquentaient régulièrement" ne pouvaient ignorer cet état de vulnérabilité, a-t-il déclaré, voyant chez Banier une "volonté de profiter de son état confusionnel pour tenter de s'accaparer sa fortune".
Le tribunal a décelé "une réelle emprise psychique et morale" de François-Marie Banier sur la femme la plus riche de France, dont les capacités de discernement, manifestement fluctuantes dès 2006, n'ont cessé de se dégrader au fil du temps. Aujourd'hui atteinte de la maladie d'Alzheimer et sous tutelle, la vieille dame n'a pas assisté au procès.
Sa fille, Francoise Bettencourt-Meyers, partie civile au procès, a déclaré à sa sortie du palais de justice: "Ma première pensée va naturellement à ma mère, pour son honneur, pour sa dignité, et puis vers toute sa famille, la nôtre. Mais il ne m'appartient pas de commenter cette décision de justice".
- Suspicion, mais pas démonstration -
Concernant les autres prévenus jugés début 2015 dans le volet "abus de faiblesse", le tribunal les a sanctionnés par des peines de prison ferme ou assorties du sursis ou par des amendes sévères.
Les juges ont notamment passé outre les réquisitions de relaxe concernant l'avocat Pascal Wilhelm, successeur de Patrice de Maistre auprès de Liliane Bettencourt, condamné à la même peine que son prédécesseur.
Moindre sévérité pour l'homme d'affaires Stéphane Courbit, qui avait in extremis trouvé un arrangement avec la famille Bettencourt à la veille du procès en lui remboursant 143 millions d'euros investis dans LOV Group (audiovisuel, énergie, jeux en ligne). Alors que le procureur n'avait relevé contre lui aucun fait "gravement préjudiciable" à Liliane Bettencourt, il devra tout de même verser 250.000 euros d'amende, mais échappe à la prison.
Quant au député UMP de l'Oise, Eric Woerth, il est relaxé des poursuites de "recel" dans le principal volet de l'affaire Bettencourt. Car s'il existe "une forte suspicion de remise d'argent" liquide de Patrice de Maistre au trésorier de campagne de Nicolas Sarkozy, comme l'ex-comptable de la milliardaire, Claire Thibout, l'a maintenu dans son témoignage au procès, "la démonstration" n'a pu en être faite, a dit M. Roucou.
Eric Woerth, tout comme Patrice de Maistre cette fois, a été relaxé dans le volet "trafic d'influence" de l'affaire jugé en mars.
Les deux hommes étaient poursuivis pour avoir conclu un arrangement selon lequel M. Woerth, alors ministre du Budget de Nicolas Sarkozy, aurait remis la Légion d'honneur à Patrice de Maistre. En échange, ce dernier était soupçonné d'avoir fait embaucher en 2007 l'épouse du ministre, Florence Woerth, dans sa société qui gérait les dividendes de Liliane Bettencourt, la richissime héritière du groupe de cosmétiques L'Oréal.
Eric Woerth et Patrice de Maistre avaient formellement démenti un tel accord.
Les juges ont estimé que si Eric Woerth était bien intervenu "en tant que trésorier de la campagne (présidentielle) de Nicolas Sarkozy" pour faire décorer Patrice de Maistre, dans des "conditions totalement atypiques", "il n'[était] pas démontré l'existence d'un pacte de corruption dont la contrepartie serait l'emploi de son épouse".
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