Les souffrances et le sentiment d'injustice de Jonathan Delay, violé avant ses six ans par ses parents et un couple de voisins à Outreau, ont résonné à Rennes au 2ème jour du procès d'un des acquittés d'Outreau, Daniel Legrand, contre lequel il a maintenu ses accusations de viol.
"J'ai été victime de l'affaire Outreau", a déclaré à la cour Jonathan Delay, partie civile avec deux de ses frères à ce procès, en début d'après-midi. "J'ai le souvenir d'avoir été violé", a-t-il ajouté d'une voix grave, en veste grise, les cheveux soigneusement gominés.
Lorsque le président de la cour d'assises Philippe Dary lui demande par qui, il répond: "la loi ne me le permet pas, ils ont été acquittés", faisant référence, sans les nommer, à certains des 13 acquittés sur les 17 mis en examen dans l'affaire Outreau.
"Est-ce que Daniel Legrand fait partie des gens qui ont abusé de vous ?", demande M. Dary. "Oui", répond Jonathan Delay. "Je sais qu'il était là, je peux l'assurer qu'il était là, je ne suis pas là aujourd'hui devant vous pour mentir". Jonathan Delay n'a en revanche pas précisé les abus qu'il reproche à Daniel Legrand. "J'ai certaines images où je le vois chez mes parents", se contente-t-il d'expliquer.
Daniel Legrand - dont le père homonyme, décédé en 2012, était comme lui un des 13 acquittés d'Outreau - est poursuivi pour des accusations de viols retenues contre lui en 2003 sur les quatre fils Delay à l'issue de l'instruction initiale de l'affaire d'Outreau, menée par le juge Fabrice Burgaud. Des accusations qui n'avaient pas encore été jugées pour la période où il était mineur.
- 'Pour vous il en manque ?' -
Jonathan Delay a aussi réitéré le récit du meurtre d'une petite fille, évoqué par lui lors de l'instruction: il a réaffirmé que le corps avait été caché sous son lit. L'enquête, disjointe du dossier, sur cet homicide n'a jamais permis de retrouver de corps ou d'indice de disparition: elle a fait l'objet d'un non lieu en 2007.
Outre les souffrances endurées pour les viols et violences réitérés que ses parents et un couple de voisins lui ont fait endurer dès son plus jeune âge, ainsi qu'à ses trois frères, Jonathan a aussi exprimé le profond sentiment d'injustice qu'il a retenu de l'instruction puis des deux procès de 2004 et 2005.
"J'ai été écouté par plusieurs personnes à plusieurs moments, plusieurs reprises, pendant je ne sais combien de jours On m'a demandé de répondre à un certain nombre de questions S'en est suivi deux procès où +ils+ sont quasiment tous sortis et acquittés", a ainsi résumé Jonathan Delay.
Son père Thierry Delay a été condamné lors du premier procès à 20 ans de prison pour viols sur ses trois frères et lui. Sa mère a été condamnée à 15 ans, et un couple de voisins, qui ont aussi reconnu les faits, a également été condamné. Aucun n'a fait appel.
"Vous êtes une victime", s'est attaché à le rassurer le président Dary. De même le représentant du ministère public, Stéphane Cantero, s'est attaché à le rassurer sur son statut de victime qui "ne fait aucun doute" avant de rappeler: "mais aujourd'hui il s'agit de Daniel Legrand, qui a été acquitté deux fois pour les viols" qu'il était accusé d'avoir commis après ses 18 ans.
"Je ne mens pas", a fermement répondu Jonathan Delay. "Je ne sais même pas ce que j'ai à gagner de venir ici".
"Vous êtes victime de vos parents, on ne l'a pas assez dit, victime de Delplanque et Grenon (le couple de voisins condamnés, ndlr) et pour vous il en manque ?", lui a aussi demandé Me Frank Berton, un des avocats de Daniel Legrand. "Bien sûr", a répondu Jonathan, "acquitté ne veut pas dire innocent, j'ai le droit de le dire ?".
Dans la matinée, les difficultés et lacunes des auditions des enfants lors de l'instruction avaient été abordées devant la cour avec d'anciens enquêteurs.
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