Les dirigeants de la Société Générale étaient au courant des agissements de Jérôme Kerviel, affirme selon Mediapart la policière chargée de l'enquête, un témoignage qui apporte un éclairage nouveau et a amené l'avocat de l'ancien trader à demander l'annulation de sa condamnation.
Ces nouveaux éléments ont émergé dans le cadre de l'information judiciaire ouverte en juin 2014 pour "escroquerie au jugement", "faux" et "usage de faux", à la suite d'une plainte de l'ancien trader.
Chargé de ce dossier, le juge Roger Le Loire a auditionné début avril, selon le site d'information en ligne, la commandante de police Nathalie Le Roy, qui avait dirigé l'enquête sur les conditions de la perte de 4,9 milliards d'euros déclarée en janvier 2008 par la Société Générale.
"A l'occasion des différentes auditions et des différents documents que j'ai pu avoir entre les mains, j'ai eu le sentiment puis la certitude que la hiérarchie de Jérôme Kerviel ne pouvait ignorer les positions prises par ce dernier", a déclaré Mme Le Roy, selon Mediapart.
A l'appui de cette impression, l'enquêtrice, qui ne travaille plus aujourd'hui dans un service de police, a notamment évoqué le témoignage d'un ancien salarié de la banque.
Opérant au sein de l'entité "risques opérationnels", il a assuré à l'enquêtrice que "l'activité de Jérôme Kerviel était connue" et affirmé avoir alerté sa hiérarchie par le biais d'un message électronique "avec une tête de mort pour attirer leur attention".
"C'est un élément parmi d'autres", estime, au sujet du témoignage de Mme Le Roy, une source proche du dossier, qui souligne que la policière n'avait jamais fait état du moindre doute lors de l'enquête, notamment dans ses procès-verbaux de synthèse.
- Importantes carences de contrôle -
Pour David Koubbi, avocat de Jérôme Kerviel, c'est un "coup de tonnerre", qui l'a amené à saisir, la semaine dernière, la Commission d'instruction de la cour de révision et de réexamen, première étape vers une éventuelle annulation de la condamnation et un nouveau procès.
Si de nombreuses failles dans les procédures de contrôle de la banque ont été mises à jour depuis 2008, la cour d'appel a estimé en 2012, comme l'avait fait le tribunal correctionnel de Paris avant lui, que Jérôme Kerviel avait été "l'unique concepteur, initiateur et réalisateur" d'un "système de fraude" qui l'a conduit à exposer la banque pour des montants colossaux.
A ce sujet, la Société Générale a rappelé que l'ancien opérateur de marché "avait lui-même déclaré aux policiers qui l'interrogeaient en janvier 2008 qu'il avait agi seul et à l'insu de sa hiérarchie".
"L'affaire liée aux agissements frauduleux de Jérôme Kerviel remonte maintenant à plus de 7 ans et a fait l'objet de plusieurs décisions de justice qui ont toutes reconnu la culpabilité pénale exclusive de Jérôme Kerviel", a souligné la banque.
L'ancien trader a été condamné, par le tribunal puis la cour d'appel qui a confirmé la peine, à 5 ans d'emprisonnement dont 3 ferme pour abus de confiance, manipulations informatiques, faux et usage de faux.
- Commission d'enquête -
Mi-mars 2014, la cour de cassation a rendu cette condamnation pénale définitive, mais a cassé le volet civil de la décision, qui attribuait 4,9 milliards d'euros de dommages et intérêts à la banque.
Un nouveau procès civil doit se tenir du 20 au 22 janvier 2016 pour établir la répartition des responsabilités dans cette perte.
"La vieille ritournelle qui consiste à dire que l'affaire a déjà été jugée ne résiste pas à l'analyse de ce nouveau témoignage qui vient confirmer les dysfonctionnements que nous dénonçons depuis des années", a commenté Me Koubbi.
Pour lui, "la Société Générale aujourd'hui est dos au mur. Leur élégance coutumière devrait consister à dénigrer le témoin".
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.