Rues jonchées de gravats et de douilles, façades détruites à la mitrailleuse lourde des centaines de personnes découvraient stupéfaites lundi le quartier de Divo à Kumanovo, dans le nord de la Macédoine, après deux jours de combats meurtriers entre policiers et insurgés d'origine albanaise.
"C'est pire qu'à Vukovar!", s'exclame Vullnet, la quarantaine, devant la maison entièrement détruite de son cousin, en faisant référence à la ville martyre croate ravagée par les forces serbes lors du conflit de 1991-95.
Les forces spéciales de la police se sont retirées dans la nuit après la fin des combats, et les habitants, qui avaient fui les affrontements, rentrent chez eux. Nombre de badauds viennent aussi d'autres quartiers par curiosité. Certains, téléphones portables à la main, prennent des images.
Dans cette ville d'environ 100.000 habitants en majorité slaves macédoniens, de même que dans la quartier peuplé en majorité d'Albanais où se sont déroulés les combats, aucune tension interethnique n'est perceptible.
Tous se disaient stupéfaits de l'ampleur des dégâts. Selon les autorités, les insurgés ont utilisé entre autres des lance-grenades et des explosifs.
Dans les quelques ruelles étroites du quartier où on eu lieu les affrontements, qui ont fait 8 morts parmi les policiers et 14 parmi les insurgés, plus d'une dizaine de maisons ont été incendiées voire détruites à l'explosif.
Des façades de dizaines d'autres maisons sont criblées d'impacts de balles de mitrailleuses lourdes et d'armes automatiques. Les rues et les jardins sont jonchés de gravats, de douilles et de cartouches vides de gaz lacrymogène.
- le pouvoir a "orchestré tout ça" -
"Il est inadmissible de jouer avec les vies humaines comme cela. C'est le pouvoir qui a orchestré tout ça pour détourner l'attention de l'opinion des véritables problèmes" de ce pays où le chômage touche 28% des 2,1 millions d'habitants, s'insurge Vullnet près de la carcasse calcinée et écrasée d'une voiture.
La Macédoine est en proie à une grave crise politique depuis des mois. L'opposition de gauche accuse le pouvoir de corruption, et ce dernier accuse à son tour l'opposition d'"espionnage" et de vouloir "déstabiliser le pays". Un contexte plus que favorable pour développer des théories du complot.
"voilà comment Nikola Gruevski (ndlr: le Premier ministre conservateur) gère les problèmes du pays!", lance un homme, avant de disparaître dans la foule. Une opinion largement partagée par les personnes présentes sur les lieux.
Pour beaucoup, ces combats réveillent la crainte d'un conflit similaire à celui de 2001, qui avait opposé pendant six mois les forces armées macédoniennes aux rebelles albanais réclamant davantage de droits au sein de la société.
Bafti Ramadani, 57 ans, se tient devant l'entrée de sa maison détruite, le regard grave.
"Des explosions de grenades nous ont réveillés. Ma femme, nos six enfants et moi nous nous sommes réfugiés dans la cave. On a été évacués plus tard par la police. Moi, ils m'ont emmené à Skopje où j'ai été interrogé toute la nuit puis libéré dimanche", raconte ce fermier.
Comme ses voisins, Bafti dit ne pas savoir qui sont les hommes qui ont affronté la police.
Les autorités affirment qu'ils étaient tous d'origine albanaise. Trente d'entre eux ont été inculpés de "terrorisme".
Un Macédonien, qui refuse de donner son identité, observe une maison éventrée. "Mais quelle catastrophe A Kumanovo, il n'y a jamais eu de problèmes, on ne méritait pas ça", lâche l'homme d'une cinquantaine d'années.
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