"Vive le cannabis libre": un joint au coin des lèvres et sur un air de ragga, plusieurs centaines de personnes ont manifesté samedi à Paris pour réclamer la dépénalisation et la légalisation du cannabis, défendant un usage thérapeutique ou "récréatif".
Rassemblés pour la Marche mondiale du cannabis, les manifestants, plutôt jeunes, arborant pour certains des t-shirts et casquettes aux imprimés feuilles de cannabis ou des vêtements aux couleurs de la Jamaïque, ont rallié la place de la République depuis Bastille, dans des volutes de haschisch.
"Qu'est-ce que nous voulons? C'est la légalisation", "no cocaïne, no crack", a scandé la foule, rassemblée derrière une banderole "Une autre politique des drogues est possible" ou des panneaux "La Ganja pour tous".
Julien, 16 ans, consommateur depuis deux ans, est venu "pour pouvoir fumer tranquillement": la légalisation permettra d'avoir "moins de trafic, de meilleurs produits et peut-être moins de criminalité", explique-t-il entre deux bouffées.
En France, la consommation de cannabis est prohibée depuis 1970, passible d'un an de prison et 3.750 euros d'amende. Dans la pratique, si l'emprisonnement pour usage est exceptionnel, les amendes perdurent.
Atteinte d'une maladie du système nerveux et du sida, Béatrice, 52 ans, raconte qu'elle était en fauteuil roulant il y a 20 ans. "Mais depuis que je fume du cannabis, je vais mieux: je remarche, ça augmente les effets de la trithérapie, et ça m'aide à manger."
Elle consomme depuis une quinzaine d'années entre 0,8 et un gramme de cannabis par jour soit "l'équivalent de 3, 4 pétards". Encouragée par son médecin, Béatrice cultive ses plants dans son jardin. "J'essaye d'être discrète."
"C'est prouvé, la consommation dégringole, la violence dégringole si c'est légalisé", affirme-t-elle. Selon elle, des milliers d'emplois seraient créés avec la fin de "cette loi de 70 répressive".
- Consommation vitale -
Un usage thérapeutique également défendu par un jeune travesti membre des soeurs de la perpétuelle indulgence, groupe militants lesbiennes, gays, bissexuels et transexuels (LGBT) en habit religieux coloré.
"Quand on a des traitements lourds très compliqués, l'usage du cannabis pour ces personnes-là est au-delà du nécessaire, c'est vital."
Dénonçant le cliché "des vieux hippies", le militant explique que le cannabis "est la seule chose qui permet à certains enfants épileptiques de vivre". "On ne leur fait pas fumer des pétards, mais on leur donne mélangé à du lait, des cookies ou des gélules, ils peuvent aller à l'école, ils ne sont pas +légumisés+ comme avec certains médicaments."
Pour Alain, "il y a de vrais lobbies pharmaceutiques () Le cannabis pourrait être un antidépresseur abordable". Le quinquagénaire regrette la "diabolisation" de la substance dans les campagnes de prévention, soutenant l'idée d'un usage "récréatif".
Selon la sénatrice écologiste Esther Benbassa, à l'origine de la proposition de loi -rejetée en avril- visant à autoriser l'usage et la vente contrôlée par l?État tout en interdisant la publicité et la vente aux mineurs, les réticences sont liées à "la morale".
"Il y a encore l'idée que le fumeur de cannabis est sur la mauvaise voie. S'il consomme tous les jours, c'est de l'addiction, il faut un accompagnement, mais c'est comme pour l'alcool", affirme-t-elle, réclamant "une législation sur un problème de santé publique".
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