A la fin avril 1215 un prêtre castillan, Dominique de Guzman, s'installait avec quelques compagnons dans une petite maison de Toulouse pour prêcher l'Evangile en pays cathare: c'est ici-même que l'ordre des Dominicains débute cette semaine les festivités de son 8e centenaire.
L'exposition "Dominique et ses prêcheurs - trésors cachés des couvents dominicains" a commencé mardi dans cette petite bâtisse médiévale adossée au mur romain de la vieille ville de Toulouse, ainsi que dans l'enceinte toute proche de l'institut catholique.
On y verra jusqu'au 30 mai de nombreuses oeuvres, confinées jusqu'ici dans les murs de leurs couvents, ainsi qu'une multitude de documents et souvenirs retraçant l'histoire de l'Ordre.
L'institut catholique accueillera aussi quatre conférences sur les débuts de l'ordre, sa messe solennelle de Pentecôte se déroulera dans l'Eglise des Jacobins, qui fut le couvent toulousain des Dominicains jusqu'à la Révolution, où repose depuis 1369 l'un des plus célèbres des leurs, Saint Thomas d'Aquin (1224-1274).
Le nouveau couvent, où vivent cinquante frères, grande nef de béton brut des années 1950, dans le style Le Corbusier, sera enfin le théâtre d'un concert et de la mise en scène du texte de Georges Bernanos "Saint Dominique".
Le jubilé se poursuivra jusqu'en 2016 à travers le monde et jusqu'à Rome (informations sur historia.op.org).
"L'aventure commence à Toulouse", explique le prieur provincial de l'ordre, Loïc-Marie Le Bot dans le petit oratoire aux briquettes disjointes qui devait servir de dortoir à Dominique et ses premiers frères.
Dès 1206, Dominique, prêtre castillan venu de Caleruega, avait commencé un travail de missionnaire dans le Languedoc séduit par le catharisme. En pleine croisade des Albigeois, "il sillonnait le pays à pied, pauvrement, contrairement aux prêtres qui l'avaient précédé", souligne l'historien local de l'ordre, Augustin Laffay.
La première communauté dominicaine de 1215 met en oeuvre ses principes: "On ne prend pas les Cathares de haut, on mène des débats publics, cela avance", assure le frère Augustin, frêle géant débonnaire, vêtu de la grande robe blanche à capuche des Dominicains.
-La page sombre de l'Inquisition-
"Les frères prêcheurs" ont rapidement essaimé autour de Toulouse, partant en mission deux par deux, avec pour arme leur conviction, souligne le religieux.
"Dominique n'a rien à voir avec l'Inquisition" qui a parsemé l'Europe de bûchers pendant plusieurs siècles, assure-t-il, car la papauté a créé l'Inquisition en 1231, dix ans après sa mort.
Pourtant, reconnaît frère Augustin, "l'Inquisition on n'y coupera pas" lors du jubilé, car la papauté s'est principalement appuyée sur les Dominicains pour mener la guerre aux supposés hérétiques.
"Le procès de l'Inquisition" sera d'ailleurs l'une des quatre conférences de Toulouse. "Il y a eu la torture, la contrainte, c'est inacceptable: Nous ne sommes pas dans la justification, mais il faut comprendre sans faire d'anachronisme", plaide Augustin Laffay.
"Le rapprochement avec l'Inquisition c'est un peu notre faute, les Dominicains l'ont revendiqué longtemps", reconnaît-il.
Erudits, lettrés, les Dominicains étaient tout indiqués pour mener des enquêtes, instruire des procès, remarquent les Dominicains.
Ils ont aussi mis leurs qualités au service de causes plus généreuses, souligne le père Le Bot, citant notamment le Dominicain Bartolomé de las Casas qui défendit les Indiens comme doués de Raison et dotés d'une âme.
Les Dominicains, dont les frères vivent en communauté, mais engagés dans la vie de leur siècle (enseignants, soignants, aumôniers.) à la différence d'ordres monastiques coupés du monde, sont aussi particulièrement fiers de leur "fonctionnement démocratique".
Les frères élisent leur responsables pour trois ans à l'échelle du couvent, quatre ans pour la province ou neuf ans pour l'Ordre, dont le maître est depuis 2010 un Français, Bruno Cadoré.
"Les frères prêcheurs" sont actuellement 6.000 dans le monde, dont un millier en formation, "une promesse d'avenir" pour le provincial. S'y ajoutent 3.000 moniales contemplatives vivant en cloîtres, 25.000 religieuses affiliées, enseignantes ou soignantes, ainsi que 150.000 fidèles laïques, engagés au coté de l'ordre.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.