Elles furent 200.000 esclaves sexuelles, pour la plupart coréennes, enrôlées dans les bordels de l'armée impériale japonaise avant et pendant la Seconde Guerre mondiale.
Les survivantes ne sont plus qu'une poignée aujourd'hui mais, au nom de "l'honneur et de la dignité", ces anciennes femmes dites de "réconfort" réclament justice au gouvernement japonais, accusé de continuer à minimiser, sinon ignorer, les souffrances infligées.
De fait, si le Japon a présenté des excuses en 1993, la droite nationaliste nippone, dont le dirigeant Shinzo Abe effectue une visite historique aux Etats-Unis, répugne à admettre le rôle de ses chefs et de ses soldats dans l'exploitation ignominieuse de ces femmes.
"Je ne mourrai pas tant que cette question ne sera pas résolue", a martelé Lee Yong-Soo, une ex-victime aujourd'hui âgée de 87 ans, lors d'une conférence de presse la semaine dernière au Congrès américain.
"Je suis une fille honorable de Corée, je ne suis pas une femme de réconfort", a plaidé Mme Lee. De honte, elle a tu ses épreuves pendant des décennies avant de devenir une des porte-voix des ex-esclaves sexuelles coréennes, faisant campagne dans le monde entier.
Elle a ainsi raconté avoir été kidnappée par des soldats japonais en 1944, alors qu'elle avait 16 ans.
Envoyée à Taïwan, elle est restée confinée dans un bordel militaire japonais pendant deux ans, violée, battue et torturée par des décharges électriques. "Je suis presque morte", a-t-elle témoigné.
L'octogénaire voudrait se trouver au premier rang devant M. Abe, et qu'"il la regardât droit dans les yeux", quand le Premier ministre conservateur s'adressera mercredi au Congrès américain à Washington - une première pour un chef de gouvernement nippon.
Mme Lee n'a pas retenu ses mots: "Abe continue de mentir, de nier le fait que nous avons été enrôlées de force".
- 'Honneur et dignité' -
Vingt-cinq élus de la Chambre des représentants, dont le président de la commission des Affaires étrangères, Ed Royce, ont récemment écrit à l'ambassadeur japonais à Washington pour demander à M. Abe "de poser les bases d'une cicatrisation et d'une réconciliation humble en évoquant les questions historiques".
Lors d'une conférence de presse conjointe avec le président Barack Obama à la Maison Blanche, le Premier ministre japonais s'est dit mardi "profondément peiné par le sort des +femmes de réconfort+" mais, là encore, il n'a pas présenté d'excuses.
Une autre Coréenne, Kim Bok-Dong, 88 ans, témoignait la semaine dernière à Tokyo.
Elle n'avait que 14 ans lorsqu'elle a été enlevée par la soldatesque nippone dans son village de Corée, alors sous domination coloniale du Japon impérial.
On lui a d'abord dit qu'elle travaillerait dans une usine textile, pour fabriquer des uniformes militaires, mais elle a fini dans la province de Guangdong, en Chine, comme esclave sexuelle, puis à Hong Kong, Singapour, Sumatra, en Malaisie et à Java dans les maisons closes de l'armée impériale.
"Les samedis, de midi à cinq heures, et les dimanches de huit heures à cinq heures, il y avait de longues lignes d'hommes", a-t-elle narré. Quinze passes les jours de semaine, beaucoup plus les week-ends. "Etait-ce une vie normale?"
"Si je n'avais pas obéi, j'aurais été battue. Je devais faire ce qu'on me disait. J'ai voulu mourir", a-t-elle confié à des journalistes.
Pour Mme Kim, le gouvernement japonais a le devoir de dire la "vérité".
"Il est temps que le Japon reconnaisse les fautes qu'il a commises dans le passé. Les nier est absurde".
Et si Shinzo Abe lui même n'est pas coupable, il lui revient la responsabilité, en tant que chef du gouvernement, de "réparer ce qui a été fait".
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