Des familles de condamnés à mort étrangers en Indonésie effectuaient mardi avec angoisse et tristesse leur dernière visite auprès de leurs proches avant l'exécution dans les prochaines heures de neuf détenus, en dépit de l'intensification des pressions internationales contre la peine capitale.
Huit étrangers - deux Australiens, un Brésilien, une Philippine, quatre Nigérians - ainsi qu'un Indonésien tous condamnés pour trafic de drogue pourraient être fusillés dans la nuit de mardi à mercredi, des ambulances transportant des cercueils blancs vides étant déjà arrivés à leur prison.
Les condamnés avaient reçu une notification d'exécution avec un préalable d'au moins 72 heures qui leur a été remise samedi en fin de journée. Les exécutions ont lieu habituellement peu après minuit (07H00 GMT) et des médias australiens ont publié des photos de croix mortuaires destinées aux cercueils des condamnés, avec la date du mercredi 29.04.2015.
Condamné à mort lui aussi pour trafic de drogue, le Français Serge Atlaoui, 51 ans, a été retiré au dernier moment de cette liste en raison d'un recours en cours devant la justice. Mais le porte-parole du parquet général indonésien, Tony Spontana, a réaffirmé mardi à l'AFP qu'en cas de rejet de sa procédure, il serait exécuté seul, et que les autorités n'attendraient "pas très longtemps".
Intransigeant sur l'application de la peine de mort pour trafic de stupéfiants, le président indonésien, Joko Widodo, est resté sourd à tous les appels à la clémence et pressions diplomatiques contre les exécutions, notamment de la France, de l'Australie, ainsi que des Nations unies.
Le Français est incarcéré depuis sa condamnation en 2007 au complexe pénitentiaire de Nusakambangan, "l'Alcatraz indonésien", sur une île isolée de Java, où les familles des condamnés dans l'attente du peloton d'exécution effectuaient leur dernière visite.
- 'Profonde douleur' -
Les proches de deux condamnés Australiens, Myuran Sukumaran, 34 ans, et Andrew Chan, 31 ans, n'ont pas pu contenir leur émotion mardi en arrivant à la ville portuaire de Cilacap reliant l'île de la "prison de la mort", certains éclatant en sanglots, d'autres criant "clémence".
Chan a épousé la veille sa compagne indonésienne lors d'une cérémonie en présence de membres de la famille et d'amis au complexe pénitentiaire, son dernier souhait.
La famille de la condamnée philippine Mary Jane Veloso est également arrivée à Cilicap pour rendre une dernière visite à cette domestique de 30 ans, mère de deux jeunes garçons, qui a répété avoir été victime d'un réseau international de trafiquants de drogue, sans faire de déclarations aux journalistes sur place.
Parmi eux, le prêtre philippin Harold Toledano leur a donné à chacun une bénédiction avant qu'ils ne se rendent sur l'île: "La famille était si silencieuse. C'est vraiment très triste. Nous voyons une profonde douleur", a-t-il déclaré à l'AFP.
Le président philippin Benigno Aquino était intervenu la veille pour demander la clémence de son homologue indonésien, et le champion de boxe philippin Manny Pacquiao, star dans son pays et très populaire en Indonésie, a interpellé dans une vidéo Joko Widodo, surnommé Jokowi, en le suppliant de ne pas exécuter Mary Jane Veloso. En vain.
Jokowi a rejeté l'appel à la clémence de son homologue après avoir consulté le procureur général indonésien, Prasetyo, qui a été catégorique: "nous n'allons pas changer d'avis".
Après avoir remporté la présidentielle l'été dernier et pris ses fonctions en octobre, Jokowi a rejeté toutes les demandes de grâce de condamnés à mort pour trafic de drogue, estimant que son pays étant dans une situation d'urgence face à ce fléau, et avait besoin d'une "thérapie de choc".
La peine capitale est une sanction courante dans d'autres pays d'Asie du Sud-Est, tels la Malaisie, le Vietnam, la Thaïlande et Singapour, où le trafic de drogue et la possession de petites quantités de drogue sont passibles d'une condamnation à mort.
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