L'Union européenne va tenir jeudi un sommet extraordinaire pour répondre en urgence au drame des migrants en Méditerranée, après une série noire de naufrages qui aurait fait plusieurs centaines de victimes.
Le dernier a eu lieu près de l'île grecque de Rhodes, où un voilier s'est échoué lundi sur des rochers. Trois migrants, dont un enfant, ont péri, et 93 personnes ont pu être sauvées au cours d'une impressionnante opération de secours à quelques mètres du rivage.
"Nous ne pouvons pas continuer comme cela, nous ne pouvons accepter que des centaines de personnes meurent en essayant de traverser la mer pour venir en Europe", a affirmé le président du Conseil européen, Donald Tusk, en annonçant la réunion extraordinaire des chefs d'Etat et de gouvernement jeudi.
Elle avait été demandée par le Premier ministre italien, Matteo Renzi, après le naufrage dans lequel entre 700 et 950 personnes pourraient avoir péri au large des côtes libyennes dimanche.
Mais M. Tusk a prévenu "ne pas attendre de solutions rapides aux causes profondes des migrations, parce qu'il n'y en a pas". "S'il y en avait, nous les aurions mises en ?uvre depuis longtemps", a-t-il insisté.
"Si nous n'agissons pas maintenant la crise va prendre des proportions dangereuses dans les mois qui viennent", a prévenu le commissaire européen en charge du dossier, Dimitris Avramopoulos, en détaillant un plan d'action en dix points qui servira de "base de travail" aux dirigeants jeudi.
Ce plan a été soumis lundi aux ministres des Affaires étrangères et de l'Intérieur de l'UE. Il prévoit le doublement des moyens pour la mission de surveillance maritime Triton, qui pourra patrouiller dans une zone plus large et devra participer aux secours.
Une mesure plus audacieuse, de capture et de destruction des bateaux utilisés par les trafiquants, est également envisagée, mais elle devra recevoir le feu vert de l'Onu et vaincre les réticences de certaines capitales, notamment Londres.
"Nous n'avons plus d'alibi", a lancé la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini. "Les tragédies de ces derniers jours, de ces derniers mois, de ces dernières années, c'en est trop".
La nouvelle du naufrage du chalutier au large de la Libye a provoqué un choc dans le monde entier. Des survivants ont raconté que des centaines de personnes, jusqu'à 950, dont une cinquantaine d'enfants et 200 femmes, étaient mortes après qu'il eut chaviré à l'approche d'un cargo portugais qui venait lui porter secours.
- Appel au secours -
Les garde-côtes italiens, qui ont repêché 24 corps et 28 survivants, ne confirment pour l'instant pas ce bilan.
La semaine dernière, quelque 450 migrants étaient déjà morts dans des accidents similaires, selon les autorités italiennes.
La série noire semblait se poursuivre lundi : un bateau pneumatique, transportant 100 à 150 personnes, et un bateau plus vaste, avec quelque 300 personnes à bord, ont lancé un appel au secours alors qu'ils se trouvaient en difficultés au large de la Libye, selon M. Renzi.
Un migrant a appelé l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), affirmant qu'il était en train de couler, et que 20 passagers étaient déjà morts, une information qui n'a pas été confirmée.
La chancelière allemande Angela Merkel s'est dite "bouleversée" par le naufrage de dimanche. "Nous ferons tout pour empêcher que de nouvelles victimes meurent devant notre porte de la façon la plus cruelle", a-t-elle ajouté.
Le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Zeid Ra'ad Al Hussein, a critiqué les politiques migratoires "cyniques" de l'UE, accusant Bruxelles de transformer la Méditerranée en un "vaste cimetière".
L'UE semble prête à réexaminer la répartition des demandeurs d'asile au sein des 28, et non plus seulement en Italie, en Grèce, en Espagne, à Malte et Chypre, les principales portes d'entrée dans l'UE.
Les Européens se montraient jusqu'ici très frileux, craignant que le renforcement des secours en mer et l'engagement à accueillir plus de gens ne créent un appel d'air, alors que le flot de migrants n'a jamais été aussi élevé. Selon le Haut commissariat aux réfugiés, 35.000 migrants sont arrivés par bateau dans le sud de l'Europe depuis le début de l'année, et 1.600 sont portés disparus.
Les Européens misent aussi sur la coopération avec les pays d'origine et de transit pour mieux réguler les flux.
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