La crise tragique de l'immigration clandestine en Méditerranée ne pourra être résolue sans stabilisation de la situation en Libye, ont martelé jeudi Matteo Renzi et Barack Obama, soulignant que "quelques frappes" ne suffiraient pas à rétablir la situation.
"La seule solution aujourd'hui est la paix (en Libye) et la stabilité des institutions", a déclaré le Premier ministre italien lors d'une conférence de presse à la Maison Blanche avec le président américain.
Soulignant que 91% des migrants qui arrivent en Italie depuis l'Afrique passent par la Libye, "exactement comme il y a trois ans lorsque les gens venaient de Tunisie en l'absence de stabilité dans ce pays", M. Renzi a insisté sur la nécessité d'une véritable coordination internationale.
Selon les garde-côtes italiens, plus de 11.000 migrants ont débarqué au cours des six derniers jours, et des centaines d'autres continuent à arriver.
Originaires de divers pays d'Afrique sub-saharienne, tous racontent un voyage harassant à travers plusieurs pays jusqu'en Libye, la violence des milices, l'angoisse des transactions avec les passeurs et la cauchemar de la traversée.
"La Méditerranée est une mer, pas un cimetière", a lancé M. Renzi, dont c'était la première visite à la Maison Blanche en tant que Premier ministre.
Evoquant la situation sécuritaire, le Premier ministre italien a martelé que tous les pays devaient se sentir concernés. "Nous devons aussi avoir pleinement conscience du fait que le travail à faire concerne la Libye mais aussi toute l'Afrique et, je dirais, le monde entier", a-t-il dit.
A ses côtés, M. Obama, qui a longuement salué l'"énergie" et la "vision" de son invité, en particulier au niveau économique, a rappelé l'inquiétude américaine face à l'établissement de zones contrôlées par des groupes "terroristes" en Libye.
Le groupe "Etat islamique veut très clairement exploiter le chaos en Libye pour installer une partie de ses hommes là-bas", a dit le président américain.
- "Cela va prendre du temps" -
Evoquant le renforcement de la lutte anti-terroriste combiné à un effort politique --"la coordination avec l'Italie et d'autres partenaires-clés va être très importante"--, il a souligné que la seule réponse crédible sur le long terme était d'avoir un gouvernement en place "qui contrôle ses frontières et travaille avec nous".
"Cela va prendre du temps", a-t-il martelé. "Nous ne pourrons pas résoudre le problème avec quelques frappes de drones ou quelques opérations militaires", a ajouté M. Obama, évoquant "un pays déchiré, de nombreuses factions tribales, et un gouvernement central qui ne fonctionne pas".
Le président américain souhaite aussi encourager les pays du Golfe "qui ont une influence sur les différentes factions en Libye" à jouer un rôle constructif. "Dans certains cas, ils ont soufflé sur les flammes du conflit militaire au lieu d'essayer de les réduire", a-t-il souligné.
Le dossier libyen a été la source de vives tensions en particulier entre le Qatar et l'Egypte. Doha a ouvertement critiqué les frappes égyptiennes contre l'EI dans ce pays, se voyant accusé en retour par Le Caire de soutenir le terrorisme. Les autres monarchies du Golfe ont apporté leur soutien à l'Egypte.
M. Obama doit recevoir mi-mai, à la Maison Blanche puis à Camp David, l'ensemble des dirigeants du Conseil de coopération du Golfe (Arabie saoudite, Bahreïn, Emirats arabes unis, Koweït, Oman et Qatar).
Face à l'afflux de naufragés sur les côtes italiennes, quatre pays de l'UE (Italie, Allemagne, France, Slovaquie) ont signé vendredi une déclaration pour réclamer une solution "commune et forte" au niveau européen.
Le chef de la diplomatie italienne Paolo Gentiloni a, de son côté, jugé scandaleux que l'UE --"la plus grande superpuissance économique de notre époque"-- ne consacre que des sommes, selon lui, dérisoires à l'opération Triton de surveillance et de secours en Méditerranée.
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