Le Premier ministre, Manuel Valls, a présenté vendredi un plan de lutte contre le racisme et l'antisémitisme, doté de 100 millions d'euros sur trois ans, pour faire face à la hausse "insupportable" des actes racistes en France.
"Le racisme, l'antisémitisme, la haine des musulmans, des étrangers, l'homophobie augmentent de manière insupportable dans notre pays", a-t-il déploré.
Rappelant que le gouvernement comptait "ne plus rien laisser passer", il a martelé que "les Français juifs ne devaient plus avoir peur d'être juifs" et que "les Français musulmans ne devaient plus avoir honte d'être musulmans".
Pour la présentation de ce plan axé sur l'école, le droit et internet, le Premier ministre avait choisi de se rendre à Créteil, théâtre d'une violente agression antisémite en décembre, lorsqu'un couple avait été séquestré à son domicile, la jeune femme violée et leur appartement cambriolé.
Trois mois après les attentats de janvier à Paris, cette visite intervient également sur fond d'explosion des actes de haine raciste.
Au premier trimestre, 226 actes antimusulmans ont été recensés, soit six fois plus que sur la même période de l'an dernier, selon l'Observatoire contre l'islamophobie. Mais un sentiment d'insécurité s'installe aussi chez les Juifs français, alors que le nombre des actes antisémites a doublé l'an dernier par rapport à 2013.
"Dans une France travaillée par le populisme, notre devoir est d'organiser le sursaut", a ajouté M. Valls.
Ainsi les paroles et actes racistes ne relèveront "plus du droit de la presse mais du droit pénal", une mesure qui fait grincer des dents chez les avocats. Le caractère aggravant du racisme et de l'antisémitisme "sera en outre inscrit dans le droit pénal", a-t-il ajouté.
- "Lieux de mémoire" -
Alors que le web apparaît de plus en plus comme une zone d'impunité, Manuel Valls a assuré que "la passivité sur internet, c'est fini". Le plan prévoit la mise en place d'une "unité de lutte contre la haine sur internet" et veut obliger les hébergeurs de contenu à "disposer d'une représentation juridique en France".
Enfin, à l'école, la formation des enseignants sera renforcée et "à chaque étape de la scolarité, un lieu de mémoire devrait être visité".
Les 100 millions d'euros serviront notamment à financer une "grande compagne de communication", mais aussi des actions au niveau local, a précisé Gilles Clavreul, le délégué interministériel à la lutte contre le racisme et l'antisémitisme. Quelque 25 millions seront aussi consacrés chaque année aux actions menées dans le cadre de la politique de la Ville.
Mais une partie de ces fonds devrait provenir de la réallocation d'enveloppes déjà existantes, selon des sources gouvernementales.
Le Premier ministres était accompagné de Najat Vallaud-Belkacem (Éducation), Christiane Taubira (Justice), Bernard Cazeneuve (Intérieur), Fleur Pellerin (Culture), Myriam El Khomri (Ville).
Il avait commencé sa visite au lycée Léon-Blum, un choix là aussi symbolique puisque c'est là qu'a été tourné le film Les Héritiers, racontant la métamorphose d'une classe lorsqu'elle passe le Concours national de la Résistance et de la déportation.
"Vous êtes tous d'origines différentes, et ça c'est une force. C'est ce message-là qui doit dominer aujourd'hui", a déclaré Manuel Valls lors d'un débat avec quelques lycéens.
Les associations, qui attendaient beaucoup de ce plan, ont réagi avec une satisfaction prudente.
Le président du Crif (Conseil représentatif des institutions juives de France) Roger Cukierman a salué "un train de mesures qui semble traiter très sérieusement un sujet () d'une gravité extrême" même si son effet "prendra du temps, notamment dans le domaine de l'éducation".
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