Les gouvernements et les institutions de l'Union européenne sont minés par les lobbies acharnés à influencer les propositions de loi, et il est impératif d'adopter des règles pour encadrer leurs activités et éviter la corruption, a plaidé mercredi l'organisation Transparency International.
"A ce jour, aucun pays et aucune institution de l'UE ne s'est doté d'un cadre satisfaisant en matière de traçabilité de la décision publique, d'intégrité des échanges et d'équité d'accès aux processus de décision publique", déplore l'organisation dans un rapport.
"Les pratiques opaques de lobbying constituent un des principaux risques de corruption pour l'Europe", ajoute-t-elle.
Les 19 pays évalués sur 28 obtiennent une moyenne de 31 sur 100 et le Conseil européen, qui représente les Etats membres, prend un bonnet d'âne avec un faible 19, juste devant la Hongrie et Chypre à 14. L'Italie est notée 20, l'Allemagne 23, la France 27 et le Royaume-Uni 44.
La Commission, qui a décidé récemment de durcir ses règles, est récompensée par une note de 53, loin devant le Parlement européen à 37.
Bruxelles est la capitale européenne du lobbying. Tout les groupes d'intérêt se doivent d'être présents s'ils veulent peser sur le processus législatif, d'abord lors de l'élaboration de la proposition par la Commission, puis lors de sa discussion au Parlement européen et entre les Etats.
Une phase active se joue également dans les Etats membres pour influencer les positions des gouvernements.
Transparency International, inscrite depuis 2008 au registre de transparence créé par la Commission européenne, s'est donné pour mission de pourfendre la corruption. "Le lobbying n'est pas mauvais en soi quand il permet aux groupes d?intérêts de défendre leurs vues face à des décisions qui peuvent les affecter", reconnaît l'organisation. Le problème est que dans l'Union européenne, "la pratique du lobbying est largement associée au secret et à l'octroi de privilèges injustifiés", déplore-t-elle.
L'organisation appuie ses accusations sur une série d'exemples comme l'achat de députés européens pour présenter et défendre des amendements ou la désignation de représentants d?intérêts industriels comme experts auprès de la Commission européenne.
"Les multiples scandales qui ont secoué l'Europe montrent que, sans règles claires et contraignantes, un petit nombre d'acteurs, notamment ceux disposant de davantage d'argent et de relations, peuvent prédominer dans la prise de décision publique, de l'infléchissement de décisions individuelles à, dans le pire des cas, une large captation de l'Etat et des institutions", accuse le rapport.
Transparency International plaide pour une définition large du lobbying et réclame l'obligation pour les lobbyistes de s'inscrire dans un registre dans lequel ils fourniront des informations détaillées sur les clients représentés, leurs contacts, les sujets abordés et les ressources consacrées à leurs activités.
Sur les 19 pays évalués, sept seulement -- Autriche, France, Irlande, Lituanie, Pologne, Royaume-Uni et Slovénie -- disposent de lois ou de réglementations visant spécifiquement les activités de lobbying, souligne Transparency. Mais ces dispositions sont "imparfaites ou inadaptées en raison d'une mise en ?uvre insuffisante et d'une application lacunaire".
Échaudée par une série d'affaires, la Commission européenne a décidé de renforcer son dispositif. Peu après son investiture en octobre 2014, son président, Jean-Claude Juncker, a imposé à tous ses commissaires et à tous les directeurs généraux de l?institution de rendre publiques leurs rencontres avec les représentants des groupes d'intérêts. Il a interdit tout contact avec les groupes non inscrits au registre des lobbies.
Il veut à tout prix éviter de revivre la mésaventure de son prédécesseur, José Manuel Barroso, contraint de limoger un commissaire, le Maltais John Dalli, accusé d'être impliqué dans une affaire de corruption liée à l'industrie du tabac.
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