Le projet de loi sur la santé, dont la mesure phare, la généralisation du tiers payant, ne passe toujours pas à droite ni chez les médecins, est soumis ce mardi au vote solennel en première lecture de l'Assemblée, une occasion pour la majorité de se rassembler.
Le texte, qui a été défendu durant deux semaines par la ministre de la Santé Marisol Touraine, partira ensuite au Sénat, en procédure accélérée. Une ministre "courageuse", selon Manuel Valls, qui, malgré les manifestations et les attaques contre elle, a promu sans relâche sa "loi d'égalité d'accès aux soins", mais lâché un peu de lest.
Ainsi, la dispense d'avance de frais pour les consultations en ville doit devenir "un droit" pour tous les assurés fin novembre 2017, comme promis par François Hollande en 2012.
Même à cette échéance en année d'élection présidentielle, il sera "impossible de revenir en arrière", juge Mme Touraine, pour qui "la loi a changé pour tenir compte de demandes de médecins" (garanties de paiement, souplesse de mise en oeuvre).
Mais plusieurs de leurs syndicats - Bloc, FMF, SML et UFML - vont encore interpeller les députés aux abords de l'Assemblée mardi matin, avant le scrutin en milieu d'après-midi, pour leur demander le retrait de cette loi qui produira "une médecine sans liberté, sans indépendance, sans secret médical".
La CSMF, principal syndicat de médecins libéraux, promet aussi de nouvelles actions, qui seront annoncées mercredi.
Derrière les médecins, l'UMP, son président Nicolas Sarkozy en tête, pourfend un texte qui "va conduire à une forme de déresponsabilisation de l'assuré social" et "à une surconsommation potentielle d'actes médicaux et de consultations". Les députés de l'opposition annoncent déjà qu'ils saisiront le Conseil constitutionnel.
Les centristes de l'UDI vont aussi voter contre, le projet de loi ne s'attaquant pas, selon eux, aux sujets du "reste à charge" pour les assurés ou à la désertification médicale.
De la prévention à l'innovation, en passant par la médecine de proximité, le projet de loi "de modernisation de notre système de santé" comprend une kyrielle de dispositions, outre celle sur le tiers payant: lutte contre le "binge drinking" (hyperalcoolisation des jeunes), mise en place de logos nutritionnels, de l'action de groupe pour les dommages dus aux traitements, accès ouvert aux données de santé, ou encore - mesures des plus contestées par la droite - redéfinition du service public hospitalier, expérimentation de "salles de shoot" et "paquet neutre" de cigarettes.
- Des 'marqueurs de gauche' -
Selon un sondage publié mardi, 73% des Français estiment que ce "paquet neutre" ne sera pas efficace pour lutter contre le tabagisme, mais 61% soutiennent l'interdiction de la cigarette électronique au travail, autre mesure programmée.
La majorité, frondeurs PS compris, devrait être au rendez-vous pour soutenir un texte qui comporte "plusieurs marqueurs de gauche, zéro de droite", selon une responsable socialiste.
Les écologistes, même s'ils notent "des avancées réelles mais modestes" en matière de santé environnementale, devraient se rallier à un vote pour ce "texte clairement social", selon Jean-Louis Roumégas.
Les radicaux de gauche devraient en majorité faire de même, bien que leur groupe soit divisé concernant les mesures anti-tabac et que leurs élus aient voté jeudi dans l'hémicycle contre l'article portant la réforme du tiers payant, pour laquelle ils préféraient une expérimentation.
Par contre, le Front de Gauche s'achemine vers un vote défavorable sur ce texte qui "met en ?uvre la privatisation tous azimuts", et tait "les coupes budgétaires", d'après le PCF. La généralisation du tiers payant "camoufle l'offensive des complémentaires privées", prévient-il aussi.
Les députés, dont de nombreux médecins, n'ont pu être dans la "co-construction" avec le gouvernement, ont remarqué plusieurs socialistes. Ils ont pu cependant enrichir les 57 articles du projet de loi, notamment en supprimant le délai de réflexion de sept jours imposé aux femmes souhaitant une interruption volontaire de grossesse (IVG), qui remonte à la loi Veil de 1975, en renforçant le consentement présumé au don d'organes ou encore en interdisant l'emploi de mannequins trop maigres. Encore vendredi, les parlementaires ont ouvert la porte à une extension du "droit à l'oubli", au regard des assurances, au-delà des anciens malades du cancer.
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