L'héritière de la maison de couture Nina Ricci a été condamnée lundi à trois ans de prison, dont deux avec sursis, et un million d'euros d'amende pour une fraude fiscale portant "atteinte exceptionnelle au pacte républicain" selon le tribunal, un jugement dénoncé comme un "avertissement" par la défense.
Arlette Ricci, 73 ans, qui n'était pas présente au prononcé du jugement, avait été repérée sur les célèbres "listes Falciani" recensant des comptes non déclarés de clients de la filiale suisse de la banque HSBC, dérobées par un employé de l'établissement et transmises aux autorités françaises.
Le tribunal correctionnel de Paris a estimé qu'elle avait fait montre "pendant plus de 20 ans d'une volonté particulièrement déterminée" de cacher au fisc français quelque 18,7 millions d'euros (estimation du fisc, qu'elle conteste) sur des comptes suisses dont elle avait hérité à la mort de son père, faits dont "la gravité porte une atteinte exceptionnelle à l'ordre public et au pacte républicain".
Le tribunal a par ailleurs ordonné la confiscation d'une maison à Paris et d'une propriété en Corse, estimées à quatre millions d'euros, que Mme Ricci avait placées dans des sociétés civiles immobilières (SCI), pour "organiser son insolvabilité" selon le tribunal.
L'avocat fiscaliste de l'héritière, Henri-Nicolas Fleurance, poursuivi notamment pour complicité d'organisation d'insolvabilité pour avoir mis en place ce système de SCI, a quant à lui été condamné à un an de prison avec sursis, 10.000 euros d'amende et à payer solidairement les impôts fraudés et pénalités. La fille de Mme Ricci, à laquelle sa mère avait fait don d'argent placé sur un compte en Suisse, a été condamnée à huit mois avec sursis pour fraude fiscale. Un ami de Mme Ricci, l'industriel Bertrand-Charles Leary, poursuivi pour complicité de fraude fiscale, a été relaxé.
- "Pression frénétique" -
Lors de l'audience en février, l'accusation avait demandé quatre ans de prison, dont deux avec sursis, et trois millions d'euros d'amende contre Arlette Ricci; deux ans de prison, dont un avec sursis, et 37.500 euros d'amende contre Me Fleurance; 18 mois avec sursis contre la fille de Mme Ricci et une déclaration de culpabilité, avec dispense de peine, contre M. Leary, qui figurait également sur les listes Falciani mais avait de son côté régularisé sa propre situation avec le fisc.
Le avocats de Mme Ricci et M. Fleurance ont indiqué attendre d'avoir pris connaissance du jugement écrit pour décider d'un éventuel appel, tout en dénonçant un procès "pour l'exemple".
"La justice s'est faite sous la pression frénétique, brutale et les anathèmes de l'accusation. Le but de la manoeuvre était transparent: mener un procès avec une tête de gondole la plus voyante possible, comme une espèce d'avertissement à tous ceux dont on pense qu'ils ont des comptes à l'étranger", a déclaré Jean-Marc Fedida, défenseur de Mme Ricci.
Relevant toutefois des condamnations "beaucoup moins lourdes que ce que demandait le parquet", il a estimé qu'un "procès qu'on voulait exemplaire a abouti en réalité à une décision complexe".
Lors des audiences, les avocats de la défense avaient notamment contesté la régularité d'un procès s'appuyant sur les listes Falciani, dénonçant la façon dont les autorités françaises étaient entrées en possession de ces listings informatiques puis les avaient utilisés. Mais le tribunal a rejeté toutes leurs demandes procédurales en ce sens.
A côté de cette procédure judiciaire, Mme Ricci n'en a pas fini avec le fisc qui lui réclame par ailleurs, pour les années 2007 à 2009, 6.745.004 euros au titre de l'impôt sur le revenu et pénalités et 3.543.044 euros au titre de l'ISF et pénalités, et plus de 200.000 euros d'amende.
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