Les syndicats de Radio France ont reconduit mardi leur grève pour 24 heures et demandé à Fleur Pellerin de jouer le rôle de médiatrice, à la veille de la présentation par le PDG Mathieu Gallet d'un plan de suppressions d'emplois qui va, selon eux, durcir un mouvement déjà dans l'impasse.
Lors d'une nouvelle assemblée générale, plus de 500 salariés ont voté à l'unanimité à main levée la poursuite du mouvement, entré mardi dans sa 20e journée. Il s'agit de la grève la plus longue de l'histoire de Radio France et elle pourrait, selon des syndicalistes, se prolonger encore toute la semaine.
Affaibli par des révélations sur ses dépenses, Mathieu Gallet, cible d'une motion de défiance du personnel la semaine dernière, présentera mercredi lors d'un Comité central d'entreprise extraordinaire son plan stratégique pour redresser les comptes du groupe (4.600 salariés), en déficit de 21,3 millions d'euros cette année.
Parmi les économies envisagées, 300 à 380 départs volontaires, assortis de 50 créations de postes dans des métiers nouveaux à Radio France (soit une réduction nette d'effectifs de 250 à 330 emplois), la suppression de la diffusion en ondes longues et moyennes, une réduction de la taille des deux orchestres de Radio France et une réforme de France Musique.
Les grévistes ont démarré la grève le 19 mars sur des revendications spécifiques (maintien du service de nettoyage, des programmes locaux de France Bleu, des orchestres). Mais tous s'attendent à un durcissement du mouvement après l'annonce du plan de suppressions d'emplois, désormais au coeur du conflit.
Ils réclament désormais au gouvernement un médiateur, jugeant Mathieu Gallet "discrédité". Mardi après-midi, l'intersyndicale a demandé à la ministre de la Culture Fleur Pellerin de jouer elle-même ce rôle. Sans réponse sur ce point mardi soir, ils gardaient bon espoir qu'un médiateur serait finalement nommé.
Le numéro un de la CGT, Philippe Martinez, est intervenu dans le conflit en jugeant nécessaire le départ de Mathieu Gallet : "Les grévistes aujourd'hui considèrent que ce n'est plus l'interlocuteur qu'il faut avoir en face d'eux", a-t-il déclaré sur Canal+. Le départ de Mathieu Gallet "n'est pas la seule solution" mais "on est arrivé à un point de non retour" dans ce conflit.
"Mercredi, lors du CCE, nous dirons que ce projet n'est pas acceptable et que la seule voie est une médiation", a averti Jean-Paul Quennesson (SUD) lors de l'AG.
"Nous sommes arrivés à un tournant à cause du plan de suppressions d'emplois", a renchéri Lionel Thompson (CGT). "Nous ne pouvons accepter ce plan", a insisté Philippe Ballet (Unsa).
Les salariés des services informatiques ont rejoint la grève mardi. En revanche, après une journée de grève vendredi, le SNJ (journalistes) restait en dehors du mouvement, mais pourrait s'y joindre après le CCE.
- "Silence radio" -
Outre les suppressions d'emplois, le plan stratégique présenté mercredi, dont l'AFP a obtenu copie, prévoit l'arrêt de la diffusion en ondes longues et moyennes (16 millions d'euros d'économies) et une réforme de France Musique, recentrée sur une grille plus musicale et complétée par des webradios thématiques. "France Musique va devenir un robinet à musique", a déploré Aline Payet (CGT).
Pour faire entendre la voix des journalistes, largement non-grévistes jusqu'ici, le président de la SDJ Ludovic Piedtenu a publié mardi une tribune où il dénonce à son tour le plan de départs. "La perspective, douloureuse, d?une nouvelle semaine de +silence radio+ se profile. Un plan de départs volontaires élevé est de nature à déstabiliser l'entreprise", a-t-il écrit.
Les musiciens des orchestres ont lancé mardi soir une pétition contre la réduction de leurs formations, signée par plusieurs personnalités allant de Jacques Attali à de grands noms de la musique comme Natalie Dessay.
Sur internet, une pétition en faveur du mouvement social à Radio France a déjà réuni plus de 21.000 signatures, selon les syndicats.
Un nouvelle AG est prévue mercredi juste avant le CCE, qui démarre à 11H00. A 09H30, Mathieu Gallet sera auditionné par la commission des Affaires culturelles de l'Assemblée.
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