Trois hauts responsables de la campagne 2012 de Nicolas Sarkozy devaient être présentés vendredi aux juges d'instruction en vue d'éventuelles mises en examen dans l'enquête sur un vaste système de fausses factures durant cette présidentielle.
Guillaume Lambert, directeur de la campagne, aujourd'hui préfet de Lozère, le député UMP Philippe Briand, qui était trésorier, et un avocat du parti, Philippe Blanchetier, impliqué dans le suivi financier de la campagne, ont été déférés au pôle financier de Paris après 48 heures de garde à vue dans les locaux de l'Office anticorruption de la police judiciaire (Oclciff), a indiqué à l'AFP une source judiciaire.
Ils peuvent être mis en examen, comme l'ont été quatre anciens cadres de Bygmalion et trois ex-cadres de l'UMP dont le parti s'est séparé l'été dernier.
Les enquêteurs ont la conviction qu'un système de fausses factures a été mis en place pour que l'UMP prenne en charge environ 18,5 millions d'euros de dépenses de la campagne de Nicolas Sarkozy. But de la fraude, empêcher que ces frais de meetings soient inscrits au budget de campagne et n'explosent le plafond autorisé de 22,5 millions d'euros, qui a finalement quand même été dépassé.
Dans ce but, la filiale de Bygmalion, Event and Cie, a émis des fausses factures à l'UMP, pour des événements dont certains n'ont pas été organisés, tandis que les coûts des meetings auraient été systématiquement minorés dans les comptes de campagne.
Parmi les quatre cadres de la société de communication mis en examen pour faux ou complicité, dont leurs fondateurs, proches de Jean-François Copé, trois ont reconnu la fraude. Mais à l'UMP, à l'exception de Jérôme Lavrilleux, les juges se sont heurtés jusqu'à présent à un mur de dénégations. Les trois anciens cadres du parti ont été mis en examen pour faux et abus de confiance. Parmi eux figure l'ancien directeur général de l'UMP, Eric Cesari, proche de Nicolas Sarkozy, et dont la signature apparaît sur des devis de conventions fictives.
- 'Que du propre' -
Les juges veulent savoir qui était au courant de la fraude, qui en a donné l'ordre et à quel moment de la campagne.
Après la défaite de mai 2012, dans une situation d'"urgence absolue", comme l'a dit Jérôme Lavrilleux? Fin mars-début avril, à quelques semaines du premier tour, comme l'affirment des cadres de Bygmalion? Plus tôt encore?
Les enquêteurs ont découvert qu'Event avait envoyé une autre série de fausses factures à l'UMP, début 2012. Simple rattrapage de prestations non réglées fin 2011 par le parti, ont répondu les protagonistes.
Guillaume Lambert, Philippe Briand et Philippe Blanchetier participaient notamment aux réunions de "suivi financier" de la campagne, selon le témoignage figurant au dossier d'une ancienne cadre de l'UMP mise en examen, Fabienne Liadzé.
Or, dès la mi-février, aux premiers meetings, les prix annoncés par Event ont fait grincer des dents dans l'équipe de campagne.
Le patron d'Event, Franck Attal, a confirmé aux juges qu'on lui avait demandé de baisser les tarifs. Mais "la machine s'emballait" et "on me demandait de nouvelles prestations" qui rendaient impossible une maîtrise des coûts, a-t-il confié, selon une source proche du dossier. Il assure avoir prévenu Guillaume Lambert et Jérôme Lavrilleux de ce problème de surcoûts mais "ils me répondaient qu'il fallait le faire", selon ses propos rapportés par cette source.
Guillaume Lambert a déjà affirmé qu'il n'avait jamais été question pour lui de fausses factures ni d'un maquillage des comptes. Signataire du compte de campagne, Philippe Briand avait également assuré n'avoir fait "que du propre".
Quant à Nicolas Sarkozy, qui n'a pas été entendu dans ce dossier, il avait contesté l'existence même d'un "système de double facturation", assurant qu'il n'avait "appris le nom de Bygmalion" que "longtemps après la campagne présidentielle".
L'instruction est ouverte pour faux, abus de confiance et tentative d'escroquerie et a été étendue au délit de financement illégal de campagne électorale.
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